Quels jeux vidéo pour débuter sur console ?

Le choix des premiers jeux vidéo pour un enfant n’est pas forcément des plus évidents, car les pièges sont nombreux et parfois sournoisement tendus par les éditeurs eux-mêmes.

La première question, que je ne développerai pas ici mais peut-être dans un autre article (teasing) si j’ai le temps et pas la flemme, c’est : à partir de quel âge un enfant peut sérieusement jouer aux jeux vidéo ? Par sérieusement j’entends :

  • qu’on parle de vrais jeux, pas de logiciels éducatifs du genre Adibou, de mini-jeux sur iPad ou en flash sur internet, de concepts expérimentaux comme Electroplankton ; on parle de jeux avec une progression à travers des niveaux ou un univers, des objectifs à atteindre, des contrôles à maîtriser, etc. ;
  • que l’enfant ne contrôle pas son personnage (ou véhicule ou autre machin) au hasard en appuyant sur tous les boutons en même temps, mais avec une logique correspondant au but du jeu.

D’expérience avec E. (6 ans), je dirais que cet âge minimum se situe aux alentours de 4 ans. Avant, la coordination oeil/main est encore un peu limite, de même que la capacité à comprendre le déplacement d’un objet sur un écran en fonction de mouvements ordonnés par une manette. Les systèmes à détection de mouvement permettent de maîtriser le concept un peu plus tôt, mais il existe très peu de jeux vraiment adaptés pour des très jeunes enfants. J’en ai déjà parlé dans l’article sur Electroplankton.

Donc voilà, aux alentours de 4 ans, je pense qu’un enfant peut commencer à s’y mettre (et c’est pas plus con que regarder la télé, sauf Bob l’éponge qui rend débile, cf. étude très sérieuse). A condition d’être face aux bons jeux.

Un faisceau d’indices pour trouver les bons jeux

Plutôt que d’établir une liste de jeux qui ne pourrait que contenir que quelques exemples et serait de toute façon rapidement périmée, je vous propose quelques critères de sélection, issus de tests réalisés au cours de 2-3 dernières années sur mon sujet d’étude (E. (6 ans)) :

  • jeux tolérants aux erreurs de mouvements : on peut donc oublier tous les jeux de plateforme qui demandent un peu trop de précision, comme Super Mario Galaxy par exemple ;
  • jeux en 2D ou fausse 3D (ou 3D limitée) : le concept du déplacement en 3 dimensions est assez difficile à maîtriser au début ; il vaut donc mieux commencer soit avec des jeux dans lesquels les déplacement se font en 2D, soit de la fausse 3D (par fausse 3D, j’entendsa 3D dans laquelle on ne peut en réalité se déplacer que suivant 2 axes, par exemple Mario Kart : on se déplace de gauche à droite, d’avant en arrière, mais pas de haut en bas car on reste « collé » à la route) ou encore de la 3D limitée (c’est-à-dire de la 3D dans laquelle des couloirs ou murs invisibles limitent en fait les déplacements, comme dans certains niveaux de certains jeux Lego par exemple). Encore une fois, Mario Galaxy est l’exemple de jeu à éviter suivant ce critère : E. (6 ans) a essayé d’y jouer alors qu’il avait 4 ans ; il était alors capable de jouer à Mario Kart sans problème, mais il n’a jamais réussi à passer la toute première planète didacticielle de Mario Galaxy (celle où il faut attraper le lapin), car la 3D y est très compliquée à comprendre, d’autant plus que le personnage se retrouve parfois la tête en bas, avec les mouvements inversés.

Même s’il faut des réflexes et une très bonne maîtrise des mouvements pour gagner à Mario Kart, on peut y jouer sans être très doué, pour le simple plaisir de contrôler le véhicule et de faire le tour des circuits. Sur Wii, le contrôle au volant, avec très peu de boutons, permet une prise en main encore plus rapide par un enfant débutant.

  • jeux tolérants aux réflexes qui n’ont pas encore atteints le niveau de ceux d’un ninja : on peut oublier tous les jeux dans lesquels une réaction en retard d’une 1/2 seconde est synonyme d’échec bloquant (note : je considère comme « échec bloquant » le fait de ne plus pouvoir rien faire dans le jeu, ou d’être ramené en arrière). Le joueur débutant doit encore réfléchir pour savoir sur quel bouton il faut appuyer pour sauter. Heureusement, chez les enfants, cette phase d’apprentissage ne dure pas (bon chez les adultes c’est un autre problème, il y en qui n’ont pas encore compris le truc).
  • jeux sans game over : l’enfant s’énerve facilement en cas d’échecs successifs conduisant à un retour en arrière (contrairement à l’adulte qui, grâce à son entraînement de moine bouddhiste, sait garder son calme en toutes circonstances, même quand cette sal*perie de boss dans Darksiders est impossible à tuer put*n de m*rde) ;
  • contrôles simples : un enfant de 4 ans ne pourra pas réaliser les Super Combos de Super Street Fighter IV tout de suite (même moi, meilleur joueur du monde, je n’y arrive toujours pas). Les manettes ont de plus en plus de boutons, même un adulte peut parfois s’y perdre ; pour des enfants qui débutent, l’idéal c’est un jeu dans lequel seuls 2 ou 3 boutons d’actions sont nécessaires (en plus du stick ou de la croix directionnelle). On pourra progressivement ajouter des boutons au fur et à mesure de la progression de la maîtrise de la manette.
  • jeu avec peu de texte écrit : dans certains jeux qui ont pourtant une image très « enfants », la lecture de textes à l’écran est obligatoire pour avancer dans le jeu ; autrement dit, l’enfant ne peut pas vraiment en profiter avant le CP, soit 6-7 ans, voire 8 ans en fonction de son aisance avec la lecture. Exemple : les jeux Pokémon sur DS ;
  • jeu multijoueur en coopération : j’y reviendrai dans un prochain article (teasing teasing, abonnez vous, teasing !), mais en quelques mots : le multi en coop permet à un adulte de jouer avec l’enfant, à la fois pour lui expliquer le jeu et les actions par l’exemple, directement sans avoir à lui prendre la manette des mains (ce qui est difficile car elle est souvent bien collée), et de passer les séquences les plus difficiles qui peuvent être frustrantes pour un jeune joueur inexpérimenté. Ce critère du multijoueur n’est pas obligatoire, mais c’est un bonus appréciable.
  • jeu varié, au niveau des décors, des personnages, des actions, etc. : ce n’est pas forcément quelque chose qu’un jeune joueur va demander spontanément. En fait on pourrait certainement le coller devant un jeu répétitif, il ne s’en plaindrait probablement pas. Mais un peu de respect quand même. Il y a tellement de bons jeux, pourquoi perdre du temps sur des jeux nuls ?

Difficulté modérée, aucun game over ni concept de « vies », pratiquement aucun texte à lire, mode deux joueurs en coopération, déplacements en « 3D limitée » la plupart du temps, peu de précipices et autres zones de mort subite… Les jeux Lego comme Lego Star Wars sont bien adaptés aux joueurs débutants, à condition qu’ils soient aidés par un adulte pour les guider à travers le jeu et les niveaux.

Les plus fins observateurs du marché du jeu vidéo auront remarqué que les jeux Lego rassemblent la plupart de ces critères – avec toutefois un bémol sur la tolérance aux erreurs de mouvements (le mode coop permet toutefois de compenser cette difficulté, grâce à l’aide d’un adulte dans le jeu au côté de l’enfant). Mario Kart fonctionne aussi assez bien (en dehors des circuits contenant de nombreux précipices et en considérant que le fait de toujours finir dernier n’est pas un échec : au moins on a franchi la ligne d’arrivée !). C’est d’ailleurs sur Mario Kart qu’E. (4 ans à l’époque) a vraiment débuté – le contrôle au volant a bien aidé, je pense.

Tous ces critères ne sont pas forcément faciles à identifier avant l’achat d’un jeu, car les tests sur les sites spécialisés s’intéressent rarement à la capacité pour un enfant à maîtriser le jeu testé – sauf lorsqu’il s’agit d’un jeu vraiment destiné aux enfants, mais d’une part ça ne représente qu’une toute petite partie des jeux qui peuvent leur convenir et d’autre part beaucoup de jeux vraiment ciblés pour les enfants sont d’énormes nullités. Inversement, les médias orientés « familles » (qui se sont faits une petite page jeux vidéo histoire de pas passer pour des ringards) n’y connaissent rien et sortent des grosses conneries, comme écrire que Mario Galaxy est adapté à des enfants de 3 ans (oui parce que c’est l’âge PEGI écrit sur la boîte, cf. infra, « Les pièges à éviter »).

L’idéal pour se faire une idée, c’est bien entendu les démos téléchargeables mais il n’y en pas pour les jeux ni sur toutes les plateformes. Bref, pour le moment, c’est pas évident…

Les pièges à éviter

Super Mario Galaxy est classé PEGI 3. En réalité, aucun enfant normalement constitué ne peut profiter de ce jeu avant 6-7 ans (et encore, avec de la pratique sur d’autres jeux permettant d’avoir bien assimilé les concepts de déplacement en 3D, acquis tous les automatismes du contrôle à la manette, et développé des réflexes et une précision suffisantes pour ne pas tomber dans le vide intersidéral toutes les 5 minutes). Je pense que l’âge minimum réel pour vraiment pouvoir jouer à ce jeu avec plus de plaisir que de frustration est aux alentours de 9-10 ans.

  • l’indication d’âge PEGI : le pictogramme PEGI qui se trouve sur la face avant de toutes les boîtes de jeux vidéo n’est pas une indication de l’âge minimum conseillé pour jouer au jeu considéré. L’âge PEGI est basé uniquement sur le contenu du jeu (présence d’éléments violents ou de drogue ou de monstres ou de sexe), pas sur sa jouabilité (les critères dont je viens de parler, notamment). On peut donc considérer qu’un enfant de 6 ans ne devrait pas jouer à un jeu PEGI 18+, qui contient certainement des zombies drogués qui se battent à la tronçonneuse contre des lesbiennes cannibales. Mais l’inverse n’est pas vrai : un jeu étiqueté PEGI 3+ est simplement un jeu dont les graphismes et le scénario ne contiennent pas de giclées d’hémoglobine, de gros mots et de vols de voitures. Mais il peut tout de même s’agir d’un jeu très complexe, avec un niveau de difficulté de fou furieux, dans lequel la moindre erreur d’inattention est synonyme de game over. Le problème de l’indication PEGI est qu’elle est la seule présente sur la boîte, et que de nombreuses personnes pensent qu’il s’agit du même type d’indication que les boîtes des jeux de société (alors que ces dernières sont bien basées sur le niveau de difficulté du jeu et non uniquement sur le degré de violence/sexe/vulgarité du contenu).
  • la licence : un jeu basé sur un dessin animé ou un film populaire auprès des enfants de 5 ans n’est pas forcément un bon jeu pour des enfants de 5 ans. Statistiquement, il y a même plus de chances que ce soit un mauvais jeu. J’en ai un peu parlé ici donc je ne vais pas me répéter. Le jeu peut soit être vraiment mauvais (les Schtroumpfs Dance Party), soit ne pas être mauvais dans l’absolu, mais inadapté à de jeunes enfants car trop difficile à maîtriser.

4 réponses

  1. Fred T. dit :

    Je veux montrer à ma fille que dans la vie, tout ne vous est pas servi sur un plateau d’argent. Dark souls c’est à partir de quel age ?

    • Stéfan dit :

      Hmmm, excellente question ; je ne connais pas personnellement ce jeu, mais ai lu des choses à son sujet.
      Le mieux serait que tu lui fasses essayer et que nous indique les résultats de l’expérience 🙂

      • Fred T. dit :

        Ben elle a trois ans, donc je vous tiens au courant dans une dizaine d’années !

  2. Christel dit :

    Mon fils 6 ans depuis hier joue aux jeux vidéo depuis environ 1 an de temps en temps. Nous avons teste Rayman et la grande aventure lego. Le deuxième à l’avantage de ne pas avoir de ‘game over’.
    Par contre ils ont une vitesse de progression hallucinante 🙂

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