Mario, Zelda et toute la clique bientôt sur tablettes et smartphones
Cette semaine, Nintendo a pris tout le monde par surprise en annonçant avoir conclu un accord avec la société DeNA, un des principaux développeurs de jeux mobiles au Japon. Un mouvement tellement surprenant que l’annonce d’une nouvelle console Nintendo, la NX, en est passée au second plan.
Car ce projet, dont la matérialisation pourrait se faire dès 2015 avec les premiers jeux tablettes/smartphones Mario et consors, est un énorme changement pour Nintendo. C’est en effet la première fois qu’on pourra jouer à des jeux basés sur les personnages et univers Nintendo, sans posséder de console Nintendo. Il y a bien eu deux ou trois exceptions, comme les calamiteux Zelda sur CD-I Philips, ou les quelques jeux d’arcade Mario Kart ou Pokémon, mais globalement, depuis le début avec la NES, pour profiter des jeux Nintendo, il faut s’équiper d’une plateforme Nintendo. Un choix qui permet au constructeur japonais de vendre ses consoles parfois simplement avec l’attrait d’une poignée de blockbusters présents sur chaque génération de console avec le même niveau de qualité vidéoludique (cf. les hausses des ventes de Wii U l’année dernière suite à la sortie de Mario Kart 8 ou de Super Smash Bros, et cette année vraisemblablement avec la sortie du nouveau Zelda).
En laissant ses personnages les plus populaires partir à l’assaut du marché des smartphones et tablettes, Nintendo accepte donc de laisser les joueurs le choix de la plateforme pour avoir leur dose de Mario et Zelda. On imagine que le calcul a été simple : combien d’argent va t-on gagner en vendant des jeux Nintendo sur mobiles, et combien d’argent va t-on perdre en vendant un peu moins de consoles (les consoles qui ne seront pas achetées par ceux qui se contenteront des jeux Nintendo sur mobiles).
Des jeux Nintendo mobiles de qualité ?
Nintendo a insisté sur le maintien de son engagement pour les plateformes dédiées : les consoles Nintendo ne vont pas disparaître (en tout cas pas à court terme). C’est le partenaire, DeNA, qui développera et éditera les jeux Nintendo pour mobiles. La bonne nouvelle pour les joueurs, c’est qu’enfin de vrais bons jeux Mario (and friends) vont pouvoir apparaître en dehors des consoles Nintendo. La demande est bien là, pour preuve le nombre de faux jeux Mario pour navigateurs, qui utilisent sans aucune licence les sprites et musiques des jeux Nintendo, et qu’on trouve sur les divers portails de jeux en flash type jeuxjeuxjeux.fr. Ces contrefaçons peuvent nuire à l’image de Nintendo, car pour l’utilisateur (ou le parent) peu informé, on peut croire qu’il s’agit d’un jeu officiel – or la qualité est souvent loin d’être au rendez-vous.
Nintendo a également déclaré que ses jeux mobiles seront de vrais nouveaux jeux, et non des portages de jeux pour consoles (à l’inverse de ce qu’on fait certains éditeurs, comme Square Enix qui réalise beaucoup de portages de ses anciens succès, des premiers Final Fantasy à Chrono Trigger en passant par Dragon Quest).
Aucune précision n’a encore été apportée sur le type de jeux ; s’agira t-il de gameplay innovants ? Ou de clones des archétypes des jeux pour mobiles, avec simplement une skin Nintendo : Zelda Crush Saga ? Mario Temple Run ? Angry Birds Kid Icarus ? Clash of Animal Crossing Clans ? Le big boss Satoru Iwata a indiqué qu’il veillerait à la qualité des jeux : « Si nous ne pouvons pas offrir aux utilisateurs les meilleures expériences de jeux possibles, la valeur des licences Nintendo sera détruite. »
Avant son contrat avec Nintendo, DeNA avait déjà signé un gros partenariat, en 2012 : Disney. Depuis, ont été sortis des jeux comme Marvel: War of Heroes (un jeu de combat à base de cartes, en freemium), Star Wars: Galactic Defense (un tower defense), et bientôt Marvel Mighty Heroes (un jeu de baston en coop). Rien de révolutionnaire donc. Mais Nintendo n’est pas Disney : le premier sait faire des jeux vidéo, le second non. On peut donc imaginer que les résultats de l’équation DeNA+Nintendo seront sensiblement différents, et vraisemblablement plus intéressants sur le plan vidéoludique, que ceux de l’opération DeNA+Disney.
Un des défis de cette opération sera d’ailleurs la maîtrise de la qualité de l’expérience, lorsque le hardware est laissé sous la responsabilité du joueur : avec un système propriétaire dans lequel ses jeux sortent sur ses consoles, Nintendo maîtrise parfaitement le rendu final pour le joueur. Lorsque le jeu peut tourner sur un ensemble de plateformes aussi divers que des téléphones aux écrans minuscules, des tablettes 10 pouces, des matériels d’entrée de gamme à moins de 100€ ou des smartphones de luxe à plusieurs centaines d’euros, comment s’assurer que tous les utilisateurs ont une expérience de jeu de qualité ?
Espérons également que Nintendo et DeNA n’abuseront pas trop des actuels travers des jeux pour mobiles, avec les fameux freemium au gameplay volontairement répétitif et ralenti, truffés de pay-to-win ou autres achats in-game visant à réduire tel ou tel élément de frustration artificiel. Là encore, le patron de Nintendo s’est voulu rassurant : « Nous n’avons pas l’intention de choisir des modes de paiements qui pourraient nuire à l’image de marque de Nintendo ou de nos licences, en lesquelles les parents ont confiance. Il est encore plus important pour nous de chercher comment nous pouvons permettre au plus grand nombre de jouer aux applications mobiles Nintendo, plutôt que de chercher quel système de paiement sera le plus lucratif. »
Et si on rêvait un peu, et que l’arrivée de Nintendo sur les mobiles, en plus d’apporter de bons jeux Nintendo, amenait par émulation les autres développeurs à proposer de meilleurs jeux, plus intéressants, plus intelligents ? Un certain nombre de développeurs se réjouissent d’ailleurs de cette annonce, qui pourrait donner un coup de boost au marché des jeux mobiles.
En bonus : un service Nintendo unifié cross-platform
En marge de l’annonce des jeux sur mobiles et de la future console NX, Nintendo a également évoqué le successeur de l’actuel Club Nintendo, qui fermera cette année. A la place, un service reliant les différentes plateformes, Wii U, 3DS, NX, smartphones, tablettes, mais aussi PC (?) est annoncé. On peut imaginer quelque chose dans l’esprit de ce qu’on trouve actuellement avec le Xbox Live. Espérons que ce dispositif permettra notamment à Nintendo d’accélérer le mouvement en matière de cross-buy, un domaine dans lequel Sony a pris de l’avance avec les achats PS Vita + PS3/PS4.