« Le jeu vidéo, c’est un jeu de société » – Marcus, l’interview fleuve !

Marcus - Then and Now

Tel Maître Yoda qui depuis 900 ans forme des Jedi, Marcus depuis 40 ans joue aux jeux vidéo. De Pong à Skylanders Trap Team ou Call of Duty Advanced Warfare, il a tout connu.

Il y a 25 ans, il en fait son métier, en devenant journaliste jeux vidéo, d’abord chez Tilt et Consoles+, et aujourd’hui à la télé sur Game One et Nolife où il transmet avec un plaisir communicatif sa passion du jeu vidéo.

Marcus m’a fait l’honneur de m’accorder une longue interview, spécialement pour les lecteurs de Geek Dad Power. Il nous parle en détails de son enfance de gamer, de ses premiers jeux vidéo, du jeu vidéo comme jeu de société familial, de l’évolution des jeux pour enfants, du duel Skylanders Vs. Disney Infinity, de Red Dead Redemption comme simulateur de fermes, de la transmission et de la conservation de la culture vidéoludique (cf.), de ses plans secrets pour introduire le jeu vidéo sur les chaînes de télé grand public (featuring Sophie Davant !), et de l’Intrépide, ce super-héros créé quand il avait 10 ans, pendant les vacances de l’été 1976.

Quels sont tes premiers souvenirs de gamer, comment as-tu découvert le jeu vidéo ?

Mon papa nous emmenait jouer au bowling quand on était petits. A l’époque, c’est là qu’on trouvait des bornes d’arcade. Après la partie de bowling, on faisait une petite partie de jeu vidéo. On jouait par exemple à Gran Trak 20, un jeu de voitures en vue de dessus, avec des volants et des pédaliers. Un truc basique, un peu à la Micro Machines, mais qui permettait déjà de jouer ensemble, c’était top.

Plus tard, mon papa, qui travaillait au Reader’s Digest et allait souvent aux Etats-Unis, a ramené un Pong à la maison, en 1976 ou 77. On jouait en famille, avec ma maman, ma petite sœur, mon papa, c’était super, vraiment un truc qui se partageait, comme un jeu de société.

Ta première console, c’était quoi ?

Console Interton VC 4000C’était une Interton VC 4000, un truc allemand, de chez Grundig. Je devais avoir 11-12 ans. L’Allemagne était en avance par rapport à la France, avec déjà des choses plus évoluées que Pong, qui commençaient à ressembler à l’Atari 2600, notamment cette console de Grundig avec des combats de tanks, un jeu avec des clowns qui devaient crever des ballons, etc.

Puis je suis passé à l’Atari 2600. Et toujours les salles d’arcade, dans lesquelles je jouais beaucoup quand j’étais au lycée. Je jouais par exemple à Pacman, Galaxian, Space Invaders, Rally-X, un jeu de course dans lequel on pouvait lâcher de quoi faire déraper les autres. Je jouais aussi dans les cafés, et toujours dans le fameux bowling.

Bornes d'arcade

J’ai eu la chance d’avoir une enfance avec des consoles ; ça coûtait très cher à l’époque. On avait un jeu à Noël, un autre pour les anniversaires… Et toujours partagé en famille, surtout avec mon papa et ma petite sœur.

« Pour moi c’est une histoire de famille, le jeu vidéo. C’est un jeu de société, quelque chose qui se partage. »Mon oncle lui avait la CBS Collecovision, j’étais fasciné par Zaxxon et Donkey Kong. Pour moi c’est une histoire de famille, le jeu vidéo. C’est un jeu de société, quelque chose qui se partage, plutôt que jouer en solo. C’est ce que je préfère.

Aujourd’hui, je n’ai pas d’enfants, mais j’ai des petits neveux, et j’essaie de transmettre ça, en jouant avec eux à Broforce ou Skylanders.

Marcus Evolutions

A propos des jeux vidéo pour enfants, justement : comment vois-tu l’évolution des jeux pour enfants, depuis les années 70-80, jusqu’à aujourd’hui ?

« Jusqu’en 1995, normalement tu arrêtais de jouer quand tu étais adulte. »Pendant longtemps, jusqu’à la Playstation, le jeu vidéo c’était un jouet pour enfants. C’était vraiment comme ça que les gens le percevaient, même si les geeks comme nous ne décrochions pas vraiment en grandissant. Jusqu’à la Playstation, normalement tu arrêtais de jouer quand tu étais adulte, voire ado. Les jeux avaient une image un peu gamin, le Pacman très coloré, les bonhommes avec des gros nez qui sautaient sur des champignons…

Spyro le DragonPuis la Playstation est arrivée. Tout à coup, ça devient un loisir pour les adultes, comme le cinéma, la BD, la musique… Il y a vraiment une bascule qui se fait en 1995. Du coup comme le jeu vidéo devenait adulte, il ne fallait pas oublier les enfants dans la bagarre. Continuer de faire des petits jeux sympas, comme Spyro le Dragon, un des premiers jeux Playstation pour les enfants.

Alors qu’ils représentaient la totalité du marché avant, les jeux vidéo pour enfants sont presque devenus une niche. Les Lapins Crétins sur la Wii, les jeux Léa Passion pour les petites filles, les Skylanders… Je trouve qu’il y a très très peu de jeux vraiment pour les enfants, c’est dommage.

Heureusement, il y a les jeux qu’on partage entre adultes et enfants. Tous les jeux Lego, qui sont géniaux pour ça. C’est la passerelle parfaite. Les vieux fans de Star Wars prennent plaisir à retrouver les personnages et les histoires des films. Et les enfants s’éclatent avec Lego Star Wars parce qu’il y a de l’action, de la réflexion, de l’exploration… Pour moi c’est la synthèse parfaite, les jeux Lego, pour faire le lien entre les générations.

Que penses-tu de l’autre gros phénomène de ces dernières années : les jeux avec figurines, Skylanders et Disney Infinity ?

Gill Grunt, le Skylander préféré de MarcusSkylanders, pour les adultes il faut un peu plus se forcer qu’avec Lego. Le monde est plus gnangnan, un peu facile, avec des grosses blagues… Mais j’ai grand plaisir à jouer à Skylanders avec mon neveu, on s’échange nos Skylanders, ce côté là est super, et les figurines elles-mêmes sont superbes. En tant que vieux geek toujours accro aux figurines, je les trouve vraiment magnifiques. Je suis fan de Gill Grunt, c’est mon préféré.

Disney Infinity a tenté de rattraper le coup mais reste en dessous. C’est moins immédiat, il y a des barrières inutiles qui ont été introduites, comme ne pas pouvoir mettre Spiderman dans le monde des Avengers. Le jeu est globalement plus limité. Le seul truc génial, ça aurait pu être le coffre à jouets. L’idée de permettre de créer ses propres jeux vidéo était vraiment très bonne. Malheureusement c’est beaucoup trop compliqué. Moi je n’arrive à rien faire. Les enfants sont peut-être moins exigeants, ils se contentent peut-être de s’amuser à mettre Spiderman dans la voiture de Mickey…

Bon par contre les figurines de Disney Infinity sont magnifiques. On a envie de toutes les acheter. Disney ça fait plus rêver. Mais le jeu reste moins bon. L’année dernière, pour offrir à mon neveu, entre Skylanders et Disney Infinity, j’ai choisi Skylanders, plus simple, plus accessible, sympa avec les arènes, etc.

Pour moi les gros jeux pour enfants aujourd’hui c’est ça : Skylanders, Disney Infinity et les jeux Lego.

Disney Infinity - Figurines Avengers

Au delà des jeux qui ciblent clairement les enfants, il y a aussi des jeux qui ne sont pas spécialement prévus pour eux, mais qui sont très sympas à jouer en multijoueur entre adultes et enfants, comme Broforce dont tu as parlé, ou Diablo 3. Qu’en penses-tu ?

J’ai une copine qui joue avec ses neveux; ils doivent avoir 4 ou 5 ans. Elle joue avec eux à Red Dead Redemption. Sans jamais tuer personne, ils vont simplement dans les ranchs, voir les vaches, les poulets… Pour eux c’est ça Red Dead Redemption : se promener en 3D dans une ferme.

Red Dead Redemption, ses cow-boys, ses vaches

Red Dead Redemption à 5 ans : et pourquoi pas ?

« Même des jeux pour adultes peuvent parfois être de chouettes bacs à sable pour les enfants. »Moi aussi avec mes potes, quand on joue en ligne à Red Dead Redemption, souvent on se balade simplement à cheval pour aller voir les paysages, regarder un coucher de soleil sur les canyons, faire les cons à chevaucher des vaches, sans tirer un coup de feu… Donc même des jeux déconseillés aux moins de 18 ans peuvent parfois être de chouettes bacs à sable pour les enfants.

Par contre sur les salons, je vois beaucoup d’enfants qui jouent à Call Of, à GTA, à partir de 10 ans… C’est un peu dommage, j’essaie de faire passer ce message, que les jeunes enfants n’ont pas à jouer à certains jeux trop flippants, comme Resident Evil… Beaucoup de parents ignorent que les consoles sont équipées d’un code qui permet de bloquer les jeux déconseillés aux moins de 16 ou 18 ans.

Le problème de ce contrôle parental automatique, c’est qu’il est basé sur la classification PEGI des jeux, qui n’est pas toujours cohérente. Par exemple Super Smash Bros sur Wii U est classé PEGI 12. On peut ainsi se retrouver avec des jeux bloqués sans réelle justification…

C’est vrai. Il y a ce problème de la définition du PEGI.

Il y a aussi les limites de chacun, sur l’âge auquel un enfant peut jouer à tel ou tel jeu. Moi je trouve qu’on peut jouer à Call of Duty à 12 ans, du moment que c’est avec un adulte qui décode le truc ; il faut juste ne pas laisser l’enfant tout seul face au jeu. Les enfants aiment bien jouer à se faire peur aussi. Resident Evil à 12 ans, pourquoi pas, c’est pas insurmontable, il faut juste être présent avec l’enfant, mettre du second degré, rigoler un peu fort quand il éclate une tête de zombie… Il faut l’accompagner, c’est ça qui est important.

En dehors des gros jeux commerciaux pour enfants, dont on a parlé, et des jeux pour adultes jouables par les enfants, l’autre phénomène du moment, c’est Minecraft.

Oui, les enfants sont à fond dans Minecraft. C’est génial. Les Lego virtuels, un jeu créatif qui se partage avec les autres, les copains, les parents. J’ai vu des enfants à Paris Games Week, à chaque fois que je leur demandais s’ils jouaient à Minecraft, dans 90% des cas la réponse était oui. « A 10 ans, ils se prennent la tête à plusieurs pour aller construire une cathédrale. Il faut quand même le faire ! »Je leur demandais ce qu’ils construisaient, il y en a qui m’a répondu “Avec des copains, on a construit une cathédrale”. A 10 ans, ils se prennent la tête à plusieurs pour aller construire une cathédrale, faut quand même le faire, ça nécessite des notions d’architecture, c’est fou !

Une cathédrale en construction dans Minecraft

Ce qui frappe aussi avec Minecraft, c’est que le jeu est très moche, par rapport aux standards actuels. Et pourtant c’est un énorme succès. Un signe de la fin de la recherche de la performance graphique à tout prix ?

Oui, tout à fait. Nintendo l’a bien compris avec la Wii : ils ont calmé le jeu, c’était très bien qu’ils fassent ça.

On voit aujourd’hui que ce ne sont pas forcément les jeux les plus beaux qui attirent les enfants. Ils sont même très attirés par les vieux jeux, j’en vois beaucoup qui font du retro-gaming, ils lisent mon livre sur le retro-gaming, ils parlent de vieux jeux, ils ont récupéré la NES de leurs parents… « Les enfants s’en foutent qu’un jeu soit nouveau ou ancien, du moment qu’il est rigolo. »Ils sont très à l’écoute, et ils s’en foutent qu’un jeu soit nouveau ou ancien, du moment qu’il est rigolo. Je trouve ça très bien, avec cette génération de joueurs.

A propos des anciens jeux justement, que penses-tu du problème de conservation et de transmission des jeux vidéo à travers les générations ? Certains jeux dont tu parles dans ton livre sur les années 90-2000 sont déjà introuvables…

C’est vrai. Ceci dit, les jeux des années 90 et 2000 ont beaucoup plus mal vieilli que ceux des années 70 et 80. Un jeu comme Cool Boarders, que je trouvais génial à l’époque, avec une super sensation de vitesse : tu le regardes aujourd’hui, tu vois du clipping à mort, la montagne qui se reconstruit en permanence, ça va pas très vite, les mecs sont carrés… Ca vieillit très mal. Un jeu qui n’a pas un concept fort derrière son apparence vieillit beaucoup plus mal. J’étais très fan de l’Amiga, je jouais à Shadow of the Beast. Visuellement c’était magnifique, avec un scrolling multidirectionnel, de la pelouse en 3D, etc. Mais le jeu est nul à chier. Plus personne n’y joue.

Les premiers Call of Duty avec le débarquement en Normandie, on se disait “C’est génial, c’est le Soldat Ryan !”. Mais aujourd’hui plus personne n’a envie d’y jouer… Call of Duty Advanced Warfare, qu’on trouve magnifique aujourd’hui, dans dix ans on en rigolera.

Alors qu’un Bomberman en vue du dessus, ça n’a pas bougé. Quand j’ai eu la Wii, j’ai téléchargé Bomberman, et on ne jouait pratiquement qu’à ça, beaucoup plus qu’aux vrais jeux Wii. C’est le plaisir de retrouver un truc qui est toujours aussi rigolo à plusieurs. Un Pacman ça ne vieillira jamais, un Tetris ça ne vieillira jamais…

Après il y a des trucs comme Hotline Miami, des jeux qui rendent hommage aux anciens jeux, en reprenant leur esthétique. C’est comme The Artist au cinéma, qui fonctionne aussi bien que les vieux Chaplin. Les classiques ne vieillissent pas, c’est marrant de s’en inspirer pour faire des trucs nouveaux. Trine, par exemple, c’est Lost Vikings qu’on avait sur Amiga, avec de jolis graphismes, mais ça reste en 2D, et ça fonctionne très bien. Il y a des mécaniques de gameplay qui sont immortelles.

D’ailleurs depuis Portal j’ai l’impression qu’on n’a pas inventé de nouvelle mécanique. On mélange les genres, dans un FPS on peut conduire une voiture, etc., mais ça fait longtemps que personne n’a inventé quelque chose de vraiment novateur. « Depuis Portal, j’ai l’impression qu’on n’a pas inventé de nouvelle mécanique de jeu. »On est plutôt sur des améliorations par petites touches. Moi j’attends avec impatience le jeu vidéo auquel on parlera comme on parle dans la vraie vie. Je pensais qu’avec Kinect ça viendrait, mais ils ont laissé tomber comme des lâches. Alors que c’était ça l’intérêt de Kinect. Ca viendra.

Les jeux vidéo sont aujourd’hui pratiquement absents des médias grand public. Le Micro Kids des années 90 n’a pas vraiment trouvé de successeur, en dehors des chaînes spécialisées comme Game One ou NoLife où tu officies. Est-ce que ça ne crée pas une situation de méfiance vis à vis de ce loisir, pour des parents qui ne connaissent pas ?

En dehors de Game One et No Life, les jeux vidéos sont absents de la télé française. Ca n’inspire pas confiance !

C’est vrai, ça fait un peu truc louche 🙂 . Ce que j’essaie de porter comme message depuis le début de ma carrière c’est “Regardez le jeu vidéo, déjà”. C’est pas dangereux, c’est agréable, ça se partage entre amis et en famille, c’est un jeu de société qui ne rend pas au idiot – au contraire ça peut même rendre plus intelligent, il y a des jeux très adultes qui abordent des thèmes très adultes comme le cinéma, et surtout ce n’est pas compliqué. N’importe qui peut s’y mettre. Il ne faut pas avoir peur du jeu vidéo, je suis la preuve vivante qu’on peut ne pas être doué et s’amuser avec le jeu vidéo, et même en étant vieux continuer à jouer.

J’essaie de transmettre ce message là, puisqu’effectivement les médias généralistes ne le transmettent pas. Ca fait dix ans que j’essaie de faire une émission de jeux vidéo sur France 2 ou France 3. J’ai un peu décroché depuis 2 ans, mais avant on allait chaque année voir les chaînes pour leur dire de se bouger.

Les directeurs des programmes trouvent que c’est segmentant. Pour eux le jeu vidéo c’est pour les garçons de 13 ans avec des boutons sur la figure. « Pour les directeurs des programmes des grandes chaînes, le jeu vidéo c’est pour les garçons de 13 ans avec des boutons sur la figure. »Ils n’en démordent pas. Dans le meilleur des cas, tu tombes sur un directeur des programmes qui a des enfants, et dans ce cas pour lui le jeu vidéo, c’est pour les enfants. Mais je ne désespère pas, parce qu’on arrive avec une génération de directeur des programmes qui peut-être jouent eux-mêmes et savent que ce n’est pas que pour les enfants.

L’autre obstacle, je pense, c’est que les chaînes ont peur de faire la promotion du jeu vidéo, et que les gens finissent par aller jouer aux jeux vidéo plutôt que regarder la télé. D’ailleurs quand les journalistes parlent des jeux vidéo, c’est soit dans la rubrique faits divers, soit pour parler du fric. Ils vont faire un sujet sur le budget de GTA, mais aucun ne va aller expliquer que GTA c’est Les Affranchis, Le Parrain ou les Soprano en jeu vidéo. Pas un ne va relever ça. Pas un ne va même lancer le jeu pour l’essayer. Ils lisent juste le dossier de presse et restent sur le plan économique, sans jamais aller dans le détail artistique de la chose. Et encore, quand ce n’est pas pour dire que ça rend idiot, violent, épileptique, etc. On a eu droit à tout…

GTA IV

Il y a une vraie réticence de la télé. Ils ont peur qu’on leur pique leurs clients. Je leur dis « C’est trop tard, les gamins regardent déjà plus internet et les jeux vidéo que la télé, donc au moins si vous leur faisiez une émission sur les jeux vidéo, pendant cette heure là, ils vous regarderaient et vous trouveraient plus sympathiques ».

J’ai réussi une fois, avec Yves Bigot, quand il était directeur des programmes sur France 2. Yves Bigot, c’est celui qui a créé Les Enfants du Rock, dans les années 80, donc un mec qui sait ce que c’est que de mettre à la télé un loisir un peu obscur, un peu rejeté. Il nous a proposé de faire une émission spéciale, pendant les vacances ; on aurait pris quelqu’un comme Sophie Davant, une mère de famille un peu classique, et on l’aurait mise entre les mains d’experts du jeu vidéo. On aurait commencé doucement avec les Lapins Crétins, et progressivement on serait allés jusqu’à la faire jouer à un Call of Duty.

Une sorte de “Rendez-vous en terre inconnue” au pays du jeu vidéo ?

Exactement ! C’était ça l’idée. D’abord avec une spéciale pour les vacances, puis si ça marchait, on aurait ensuite fait une émission hebdomadaire, où on aurait parlé de l’actu du jeu vidéo, en invitant à chaque fois un people ou quelqu’un qui ne connait pas le jeu vidéo, pour l’amener dans cet univers avec nous.

Trois mois après que nous ayons décidé de lancer ça, Yves Bigot a été viré. Le nouveau directeur des programmes a tout annulé. Conclusion : quand tu arrives à tomber sur un mec avec qui ça marche, il y a des chances qu’il soit viré dans les trois mois. Je ne désespère pas, mais j’ai un peu arrêté de démarcher les grosses chaînes. Sur les petites chaînes au moins je fais ce que je veux, je peux montrer des jeux PEGI 18, je peux dire du mal d’un jeu que je trouve mauvais, etc.

En dehors de toi, qui pourrait porter un projet d’émission de télé sur une chaîne grand public ?

Bertrand Amar et Marcus

Bertrand Amar et Marcus (ici ensemble au Vietnam, ou un truc dans le genre)

Il y a Bertrand Amar aussi, qui fait beaucoup de choses sur les jeux vidéo depuis longtemps. Je m’entends très bien avec Bertrand. Il y a 4-5 ans, on a élaboré un plan ensemble. Je suis allé voir M6 en leur disant “Bertrand Amar prépare une émission de jeu vidéo pour TF1” et Bertrand est allé voir TF1 en leur disant “Marcus prépare une émission pour M6”. Comme les deux chaînes se détestent, on pensait que ça pouvait marcher. Finalement ça a échoué, des deux côtés.

L’année suivante, Bertrand a réussi à signer quelque chose avec TF1, mais un mois avant la première émission, ça a été annulé…

Dernier sujet : peux-tu nous parler de l’Intrépide, ce personnage que tu as créé quand tu avais 10 ans, et qui est aujourd’hui le héros d’une vraie BD ?

Haha ! L’Intrépide !

L'Intrépide

L’Intrépide, la version originale de 1976 par le petit Marcus, 10 ans

On m’avait offert un special Strange quand je suis parti en vacances, à l’été 1976. J’ai tout lu dans le train, donc une fois arrivé je n’avais plus rien à lire. Je me suis dit que j’allais créer ma BD, en m’inspirant de ce Strange, de Spiderman et Ironman, que j’adorais. J’ai créé ce truc vraiment pour moi, pour avoir quelque chose à lire.

L’année dernière quand j’ai mis ça en ligne, j’étais loin de m’imaginer la suite. On finissait le tournage d’une émission où on parlait de Spiderman, et une minute avant je me suis dit que j’allais montrer mon Intrépide que je venais de retrouver. Je pensais que les gens allaient se foutre de moi. Quand j’ai mis ça en ligne et que j’ai reçu le premier dessin, je n’en revenais pas. Que ne serait-ce qu’un seul gars puisse redessiner l’Intrépide, je n’y croyais pas. Puis j’en ai reçu 10, 20, 30, aujourd’hui j’ai plus de 400 hommages, et des trucs de fous, parfois par des professionnels. Rien que ça, j’étais heureux.

Parmi eux il y avait Guillaume (*Lapeyre) et Rémi (*Guérin) qui m’ont proposé de faire la suite. On est allé voir Ankama, sans y croire. Ankama y a tout de suite cru beaucoup plus que nous. Ils nous ont dit “Y a pas de super-héros français, allez-y, créez le. On ne pas se contenter de surfer sur le buzz Facebook, on va créer un vrai héros. Après tout il est pas si con qu’il en a l’air.” Aujourd’hui ça semble bien marcher, et la suite serait dans les tuyaux chez Ankama. Ankama c’est incroyable, c’était une toute petite boîte qui aujourd’hui fait de tout. Donc il n’est pas exclu qu’un jour on ait un jeu de société l’Intrépide ou un dessin animé. Si les enfants le mercredi matin regardent le dessin animé l’Intrépide, ce sera vraiment le truc de fou, pour moi. La boucle serait bouclée.

L'Intrépide

L’Intrépide, version 2014. Une vraie BD éditée par Ankama, par Marcus, Rémi Guérin et Guillaume Lapeyre.

Quand je vais à la Fnac je vois qu’entre Batman et Ironman, il y a l’Intrépide, c’est incroyable, c’est magique. Quand j’ai vu ça je me suis dit que je pouvais mourir tranquille. Cette histoire avec l’Intrépide, vraiment c’est une des plus belles choses qui me soient arrivées dans la vie. Déjà parce que ça touche à mon enfance, et parce que c’est grâce aux gens qui me suivent, sur Facebook, à la télé. C’est grâce à eux, je ne les ai pas poussés, je n’ai pas dit “le premier qui m’envoie un dessin de l’Intrépide, je lui offre un jeu”, c’est venu spontanément. C’est le bonheur.

Un des trucs les plus beaux qui me soient arrivés, avec le fait d’être payé pour jouer aux jeux vidéo. Depuis 25 ans je me réveille tous les jours en me disant que c’est chouette, je vais avoir plaisir à travailler, avec des gens que j’aime, c’est cool, c’est un chouette métier !

Merci beaucoup à Marcus pour le temps qu’il m’a accordé pour cette interview !

Vous pouvez retrouver Marcus sur sa page Facebook et sur Twitter. A la télé il est tous les jours dans #TeamG1 sur Game One et dans la Game One Box, où il teste des jeux avec toute l’équipe. Il est également sur Nolife dans Chez Marcus où il teste des jeux, chez lui, dans son antre de geek (en attendant de jouer à Call Of avec Sophie Davant sur France 2 !). Et enfin côté livres, Marcus vient de sortir Nos jeux vidéo 1990-2000 (où comment prendre un méchant coup de vieux en réalisant que la PS2 c’est déjà du retro-gaming), et bien sûr les aventures de L’Intrépide, en BD !


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2 réponses

  1. kikivim dit :

    j’en suis resté au « concombre masqué » et à « pimpampoum »….mais à 64 ans on peut comprendre (je suis tout de même retraité et ancien informaticien depuis 1972…).sinon,un grand bravo pour ce doc.

  2. Kristen Le Falher dit :

    Du déterrage 5 ans après (oui j’essaie de rattraper mon retard en cliquant sur les articles conseillés 😛 ).
    Bizarre qu’il n’y ait pas plus de commentaires, tu as fait une interview de Marcus, quoi !! J’avais zappé cet épisode…

    J’avoue que depuis quelques temps je me suis bien éloigné du monde des jeux vidéos (oui, le côté plus parent que galactique), mais je partage beaucoup la vision de Marcus sur le jeu. Ça doit venir de mon côté gros doigts…

    J’aimerais rebondir sur l’exemple de Red Dead Redemption, il n’existe pas dans ces jeux un genre de verrouillage parental intégré, qui donne une trame différente à l’histoire, permettant de jouer sans avoir d’armes, etc. ?

    Je me souviens le temps passé dans les premiers jeux à monde ouvert (ou du moins à grandes maps) à juste se balader ou faire des conneries…

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